« Ringarde », « molle », la gentillesse en prend souvent pour son grade. Dans un monde cynique et brutal, le gentil est forcément faible et naïf. Et si c’était le contraire? Nous en sommes convaincus : la gentillesse est une valeur moderne, plus que jamais nécessaire.
Valeur positive embrassant générosité, bienveillance et altruisme, la gentillesse a pourtant souvent mauvaise presse. Synonyme, pour certains, de mièvrerie, de naïveté ou de simple bêtise, elle est vite renvoyée au pays des Bisounours, là où, justement, « tout le monde est beau et gentil». Dans la vraie vie, à moins d’être « bonne poire » ou de postuler à la canonisation, nous croyons parfois qu’il vaut mieux être battant, égoïste et sans états d’âme, conditions sine qua non pour réussir et se faire respecter. Le gentil, le mollasson, le soumis, trop faible pour connaître ses désirs et pour les imposer aux autres, est fatalement un perdant, utilisé par les cyniques pour effectuer les basses besognes. « Merci, tu es bien gentil », recueille-t-il avec dédain. Esprit d’entraide, d’écoute et d’amabilité, comment la gentillesse a-t-elle hérité d’une si mauvaise réputation ? En passant, au cours de son histoire, par des sens tout à fait opposés, éclaire le philosophe Emmanuel Jaffelin, auteur d’un Éloge de la gentillesse (Bourin Éditeur, 2010). : « Signifiant, dans l’Antiquité, l’appartenance à la noblesse romaine, le mot gentilis a, aux débuts de l’Empire, défini la nation, puis son contraire, l’étranger, le barbare. Récupéré ensuite par les Hébreux pour désigner les non-juifs (les “goys”) et par les chrétiens pour qualifier les païens (les “gentils”), il devient ainsi synonyme de faiblesse morale et religieuse. Plus tard, la Renaissance veut revenir à la pureté aristocratique du mot, mais les “gentilshommes” sont en fait des courtisans, soumis au roi. 1789 achève la gentillesse, en en faisant l’apanage des affameurs du peuple et des vaincus. » (...)
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